Homophobie:
la relaxe de Christian Vanneste
agite la blogosphère
Cf. cet article d'aujourd'hui sur le monde.fr:
L'annulation de la condamnation du député UMP Christian Vanneste pour injure homosexuelle par la Cour de cassation, mercredi 12 novembre, a beaucoup fait réagir sur Internet. Si le député du Nord se réjouit, sur son blog, de "la victoire du courage et du bon sens", la blogosphère ne partage pas forcément son avis, d'autant que, comme le rappelle dans un vidéo-montage le site Gayclic, ce professeur de philosophie a tenu plusieurs fois des propos contestés sur les homosexuels.
SUR LE MÊME SUJET
Compte rendu Propos homophobes : Christian Vanneste blanchi en cassation
A commencer par les blogs d'avocats. Serge Slama, maître de conférences en droit public à l'université Evry-Val d'Essonne, explique que la Cour a estimé dans son arrêt que le contenu des propos du député, qui avait déclaré en janvier 2005 que l'homosexualité était "inférieure à l'hétérosexualité", "ne dépasse pas les limites de la liberté d'expression". L'avocat Gilles Devers précise que cette décision marque "une évolution fondamentale du régime de la liberté d'expression". Avec cet arrêt, la Cour de cassation "tire les enseignements du droit européen", plus libéral en terme de liberté d'expression, notamment avec l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). Pour l'avocat, c'est la victoire du droit européen sur le droit de la presse français, plus restrictif en matière de diffamation et d'injure ; le délit d'injure envers un groupe de personnes en vertu de leur orientation sexuelle ayant été créé par la loi du 30 décembre 2004. Maître Eolas, célèbre avocat-blogueur anonyme, va dans le même sens, mais il "ne pense pas qu'on puisse déduire de cette décision que le délit d'injure homophobe est en soi contraire à l'article 10 [de la CEDH] et de facto abrogé". Pour les deux avocats, cette décision est plutôt une bonne chose : elle permet, selon Gilles Devers, de laisser "débattre pour mieux combattre (...) les idées condamnables".
UNE DÉCISION QUI "RELÈVE D'UN AUTRE ÂGE"
"Non, la Cour de cassation ne légalise pas l'injure homophobe", renchérit Alain Piriou, ancien porte-parole de l'Inter-LGB (Interassociative lesbienne, gaie, bi et trans). "A trop en faire, on risque de laisser croire qu'il est désormais légal de tenir des propos homophobes", craint-il. Si Christian Vanneste "avait déclaré les homosexuels comme inférieurs aux hétérosexuels (...), la justice ne [lui] aurait pas fait de cadeau", souligne-t-il, en précisant que le député du Nord n'a pas visé une personne mais a critiqué l'homosexualité en général.
Les associations qui ont porté plainte contre Christian Vanneste sont, elles, furieuses. Sur son site, SOS-Homophobie publie un communiqué titré "Trois millions d'homosexuel(les) sont consternés". Pour l'association, la décision de la Cour de cassation "relève d'un autre âge" et juge que la loi de 2004 qui punie l'injure homophobe devrait "demeurer la référence incontestable". Sur son blog, Caroline Mecary, l'avocate des trois associations plaignantes (SOS-Homophobies, Act Up et le Syndicat national des entreprises gaies), note que "le symbole qui est adressé à l'ensemble de nos concitoyens est plus que funeste et doit être combattu".
Même à l'UMP, cette décision provoque des remous. Dans un communiqué intitulé "Casse-toi pauv' pédé", GayLib, un mouvement associé à l'UMP, exprime sa crainte que "cet arrêt de la Cour de cassation [donne] à croire aux homophobes qu'ils peuvent exprimer leur haine en tout impunité". Jean-Luc Romero, conseiller régional et ancien secrétaire national de l'UMP, demande à son ancien parti de se positionner pour "dire [s'il] estime que les propos tenus et réitérés par M. Vanneste sont acceptables et si les propos homophobes font partie de la liberté d'expression".
Quoi qu'il en soit, cette décision n'a pas fini de faire parler d'elle : l'association noire et métisse homosexuelle Tjenbé Rèd appelle en effet à un rassemblement silencieux le 19 novembre devant la Cour de cassation "pour rendre hommage aux victimes de l'homophobie".